Olivier Grenet

32 ans, est directeur Produit de la société Wedia. Diplomé de l’universite Paris Dauphine, il débute sa carrière chez Andersen Consulting puis il occupe le poste de directeur technique d’une start-up.

Dominique-Marie Dugasse

31 ans, est psychologue. Diplômée d'un DESS en psychologie, Dominique Marie a récemment ouvert son cabinet à Maisons-Laffite. Elle a commencé sa carrière en tant que directrice des ressources humaines d'une start-up.

Sébastien Petit

32 ans, est responsable marketing du magazine FHM. Diplômé de l'ESSEC, il débute sa carrière chez Disney Vidéo et Hachette livre puis devient directeur marketing d'une start-up.

L’interview des auteurs

Pourquoi avez-vous écrit ce roman ?
La start-up dans laquelle nous travaillions tous les trois avait fait faillite et nous regrettions que tout cela s'arrête si brutalement. Dès que nous nous sommes retrouvés au chômage, nous avons réfléchi à différents projets de création d'entreprise. Mais, bizarrement, c'est l'idée du roman qui s'est imposée. Ecrire ce roman c'était en quelque sorte continuer l'aventure. C'était une façon dese dire que nous n'avions pas travaillé pour rien. Il fallait que quelque chose reste de cette aventure furtive au cœur de ce que l'on appelait à l'époque la Nouvelle Economie. La création et l'écriture nous ont permis de prendre du recul et de faire le deuil de cette période de notre vie si euphorique !ƒ

Comment s'est passée l'écriture à trois ?
Très bien, on se connaissait bien tous les trois et avions l'habitude de travailler ensemble. Nous avons beaucoup ri pendant nos séances d'écriture. Nous nous rencontrions toutes les semaines chez Marie Joe le fameux café du Sentier, qui a connu son heure de gloire au temps de la bulle Internet. Tous trois avons mis la main à la patte. Les qualités des uns ont compensé les faiblesses des autres. Une fois le ton défini et le contenu de l’histoire et des chapitres établis, nous nous sommes répartis l’écriture du roman. C’est Dominique qui s’est chargée d’uniformiser les contenus. Nous avons travaillé pendant près d’un an en 2001.ƒ

Pouvez-vous résumer en quelques mots votre livre ?
Le roman Tookasse.com raconte les tribulations de jeunes salariés confrontés aux aléas de la vieen entreprise. C'est le roman miroir d'une génération, celle des trentenaires, décrite avec beaucoup d'humour et de second degré.ƒ

C'est un peu autobiographique, non ?
Oui bien sûr, mais vous seriez étonné de savoir ce qui, dans l'histoire, relève de la fiction et ce quis'inspire de la réalité. Mais chut !ƒ

Pourquoi avoir attendu si longtemps entre la rédaction et la publication du roman ?

Dès la fin de l'écriture, nous avons envoyé notre roman par courrier de manière traditionnelle à différentes maisons d'édition parisiennes mais nous avons essuyé des refus. Nous avons également contacté quelques personnalités de l'audiovisuel car nous rêvions que notre histoire soit adaptée à la télévision ou au cinéma. Nous avions d'ailleurs envoyé notre manuscrit à Thierry Lhermitte qui a eu la gentillesse de nous répondre rapidement. Il venait malheureusementd'arrêter ses activités de producteur. Puis, pendant un an, le roman est resté dans un tiroir. C’est en 2003 que Sébastien a eu la chance de rencontrer Stéphane Watelet des Editions Télémaque dans le cadre professionnel.ƒ

Qui a eu cette idée de téléchargement gratuit ?
Nous trois. Nous avons toujours voulu diffuser Tookasse.com gratuitement via Internet. Mais pourque le roman soit effectivement considéré comme tel par les futurs lecteurs internautes, nous attendions de trouver un éditeur qui accepte de le sortir en librairie. Et puis c'était aussi cohérent par rapport au sujet du roman : utiliser Internet comme support naturel de diffusion de notre livre. Et Stéphane Watelet a accepté ce pari pas si fou que cela !ƒ

Pourquoi proposez-vous de télécharger gratuitement de l'intégralité du roman ?

Dès que nous avons commencé l'écriture du roman, nous savions que nous voulions le diffuser surInternet. Nous utilisons régulièrement le web, les emails, les messageries instantanées, etc. Internet c'est notre quotidien. Nous voulions expérimenter ce nouveau mode de diffusion cohérent et naturel avec le sujet du roman. Pour nous, c’est un moyen de partager notre œuvre et de permettre aux gens d’en avoir un avant-goût… Et puis d’en parler et peut-être de l’acheter. Et bien le net pour le livre, c’est comme la radio pour la musique ! ƒ

Avec votre offre de téléchargement gratuit, vous n'avez pas peur du flop en librairie ?

Très sincèrement oui et non. Oui car cela signifierait que le public boude notre roman. Non car le premier tirage n'est pas très élevé : 5 000 exemplaires. Et nous avons bon espoir qu'il y aura au moins 5 000 lecteurs qui voudront soit découvrir pour la première fois notre roman soit fairepartager leur plaisir de lecteur à leurs proches, amis et parents. Si le roman plaît, les internautes lecteurs voudront offrir le roman à leur entourage mais sous la forme classique d'un livre et non d'une liasse de feuilles A4 encombrantes. Nous faisons le pari que les gens aiment le livre aussi pour ce qu’il est, comme objet à mettre dans sa bibliothèque. Qui n’a jamais racheté un livre qu’il avait déjà lu !ƒ

Pourquoi ne pas permettre le téléchargement avant la date de sortie du roman ?

Sincèrement, cette idée ne nous a pas du tout traversé l'esprit. Je ne sais pas pourquoi. Pour nous, il était évident que le téléchargement devait être simultané à la vente en librairie. Mais peut-être le ferons-nous une prochaine fois ? Cette possibilité de téléchargement du roman est, avant tout pour nous un moyen de rallonger sa vie au-delà de l'éventuel succès ou échec commercial.ƒ

Cette histoire de téléchargement n'est qu'un coup marketing pour vendre un roman de qualité moyenne, non ?

Mais si c'est ce que vous pensez du roman, nous le regrettons car notre démarche artistique estsincère. Quant au téléchargement gratuit du script intégral du roman, s'il constitue un nouveau moyen de donner envie au public de lire Tookasse.com, tant mieux.ƒ

Avez-vous le sentiment de participer au débat sur la gestion des droits d'auteur sur Internet ?

Non, ce serait prétentieux de le croire. En revanche, nous apportons peut-être un éclairage supplémentaire sur l'utilisation de l'Internet au profit de la découverte de nouvelles œuvreslittéraires et de nouveaux auteurs. Lorsque que vous achetez un CD dans les magasins spécialisés de produits culturels, vous avez généralement la possibilité d'écouter l'intégralité du CD avant de vous décider à l'acheter, grâce à des bornes de lecture disposées à tous les étages. Mais pour un livre, c'est une autre histoire, vous ne pouvez pas lire l'intégralité du roman avant de vous décider à l'acheter. Grâce à Internet, désormais, vous pouvez le faire.ƒ

Combien gagnez-vous pour chaque livre vendu ?
Notre éditeur nous a demandé de garder ce chiffre secret. Nous n'allons pas trahir la confiance de celui qui a accepté de nous suivre dans notre folie. Celui qui prend le plus de risques, c'est lui ! Il fait le double pari insensé de sortir notre roman et de l'offrir simultanément en téléchargement sur Internet.ƒ

A votre connaissance, y a-t-il d'autres exemples de téléchargement gratuit de nouveaux romans ?

Oui, il y a l'expérience du Collectif italien Wu Ming qui offre gratuitement la possibilité detélécharger gratuitement leurs romans. www.wumingfoundation.com

Leur premier roman est téléchargeable gratuitement depuis trois ans déjà. Il en est à sa douzième édition et a dépassé les 200 000 exemplaires vendus. Leur démarche résulte d'une réflexion très poussée sur le copyright. Nous ne sommes pas du tout calés sur ces sujets. C'est en parlant de notre projet autour de nous, que nous avons pris connaissance de Wu Ming. Leur succès nous a confortés dans nos choix. Dès que nous avons commencé l'écriture du roman, nous savions que nous voulions le diffuser sur Internet. Nous utilisons régulièrement le web, les emails, les messageries instantanées, etc. Internet c'est notre quotidien. Nous voulions expérimenter ce nouveau mode de diffusion cohérent et naturel par rapport au sujet du roman.ƒ

Avez-vous le projet d'écrire un nouveau roman ?
Pourquoi pas ? Pour être très franc, nous avions déjà en 2001 écrit le premier chapitre de Tookassé 2…ƒ

Pourquoi avoir demandé à Jean-Luc Excousseau de préfacer votre roman ?

C'est d'abord quelqu'un qui a beaucoup d'humour. Et ce trait de caractère collait bien avec le tonde notre roman. Nous étions à la recherche d'une personnalité reconnue dont le regard sur les tribulations de notre génération ne pouvait qu'apporter une distance salutaire à notre histoire. Son expertise en sociologie des générations est reconnue par tous aujourd'hui. Pour lui, nous faisons partie de la génération des trentenaires, les "Mobiles Moraux" surnommés les "Momos". Nous avons été frappé par la finesse de son analyse qui offre un éclairage supplémentaire au phénomène Nouvelle Economie puisque la grande majorité des employés de ces sociétés kleenex étaient de la même génération que nous.ƒ

Est-ce que votre roman fera l'objet d'éditions à l'étranger ou d'adaptionscinématographiques et télévisuelles ?

Cela dépendra sans doute du succès qu'il rencontrera ou non en France. Notre rêve de voir notre roman Tookasse.com édité vient enfin de se réaliser, c'est déjà pour nous une grande source de satisfaction.ƒ

Quelle est votre position quant au piratage ?
L'existence même du piratage sur Internet résulte essentiellement du fait que les consommateurssont prêts à bénéficier de services sur Internet qui n'existent pas encore ou qui ne sont pas assez fiables techniquement. C'est le jeu naturel de l'offre et de la demande qui s'exprime ici en défaveur de l'offre. Il appartient aux distributeurs professionnels de réagir très rapidement pour développer une offre de qualité en adéquation avec la demande du marché. Mais tout reste àinventer avec Internet. Notre démarche s'inscrit dans la mouvance actuelle qui s'appuie sur les atouts d'Internet pour initier de nouvelles formes de partage et de communication de la littérature: bookcrossing, weblogs, etc.
Dans tous les cas, la démarche de Tookassé.com ne cherche en rien à justifier le piratage mp3 sur le net. Nous pensons que chaque produit culturel a sa problématique propre. La musique et lelivre sont dans des problématiques très différentes vis à bis du net.ƒ

Avez-vous déjà téléchargé illégalement de la musique sur Internet ?
Non mais j'ai des amis qui le faisaient, un peu comme tout le monde au début… Mais je suis un vrai passionné de musique et je ne trouvais pas la qualité audio escomptée. Aujourd'hui, les offres de téléchargement légal sur Internet sont fiables techniquement avec un son qualité CD. Il ne reste plus qu'à ces magasins virtuels de proposer des fonds de catalogues, des inédits, des faces B, des collectors, des vieux enregistrements… Bref des raretés pour contenter des passionnés comme moi !